Le chevreuil en France

Le chevreuil en France

Dans les premières brumes du matin, lorsque la lumière s’étire encore, il n’est pas rare d’observer une forme au bord d’un champ. Fine, élancée, nerveuse, elle incarne une vraie élégance : c’est le chevreuil européen (Capreolus capreolus). En France, ce petit cervidé est devenu l’un des symboles de nos territoires présent presque partout sur le territoire continental, absent seulement de la Corse.

Une morphologie de sprinteur discret

Le chevreuil se distingue par une morphologie adaptée à la fuite rapide et silencieuse. Mesurant entre 60 et 75 cm au garrot pour une longueur de 95 à 125 cm, il pèse en général de 15 à 30 kg selon le sexe et le milieu. Le mâle, appelé brocard, porte de courts bois perlés à deux ou trois andouillers, rarement plus. Ces bois tombent à l’automne, puis repoussent durant l’hiver, protégés par le velours avant d’être « frayés » au printemps. La femelle, la chevrette, en est dépourvue.

Son pelage change au rythme des saisons : d’un brun-roux éclatant en été, il devient gris-brun en hiver, parfaitement adapté à la végétation morte et aux sous-bois ternes. À l’arrière, le miroir anal blanc en forme de cœur ou de haricot est une véritable balise visuelle, bien connue des chasseurs lorsqu’un animal détale en silence.

Un animal qui aime les lisières

Le chevreuil affectionne les paysages en mosaïque : forêts claires, lisières, bocages, clairières, cultures et friches. Contrairement au cerf, il fuit les forêts trop denses et préfère les zones où couvert et nourriture alternent. Ce goût pour les milieux variés explique sa remarquable expansion depuis plusieurs décennies. Il est aujourd’hui présent sur plus de 90 % du territoire forestier français. C’est un animal qui s’épanouit dans la diversité.

Une biologie rythmée par la discrétion

Le chevreuil vit selon un cycle bien réglé. Les mâles deviennent territoriaux dès le printemps, marquant de leurs bois les jeunes troncs, ces frottis sont la signature de leur présence. Le rut a lieu en juillet et en août. C’est à cette période qu’on observe ces fameuses poursuites circulaires entre brocards et chevrettes, qui laissent dans les herbes ces traces caractéristiques appelées « ronds de sorcière ».

Particularité remarquable : le chevreuil pratique la diapause embryonnaire. L’œuf fécondé n’implante son développement que plusieurs mois après la reproduction. Les naissances ont donc lieu au cœur du printemps suivant, en mai ou juin, assurant aux faons des conditions favorables dès leurs premiers jours. Une chevrette met bas généralement un ou deux faons, rarement trois.

Un régime sélectif qui façonne les forêts

Le chevreuil est un herbivore sélecteur. Il choisit avec soin jeunes pousses, bourgeons, feuilles tendres, ronces et herbacées riches en nutriments. Ce comportement le rend très sensible à la qualité du milieu… mais aussi capable d’exercer une pression importante sur la régénération naturelle des forêts lorsqu’il est trop nombreux. C’est tout l’enjeu de l’équilibre sylvo-cynégétique : maintenir des populations saines sans compromettre l’avenir des peuplements forestiers.

Santé et rôle écologique

Animal sentinelle autant qu’hôte discret, le chevreuil joue un rôle dans les équilibres écologiques. Il est porteur fréquent de tiques, mais contribue paradoxalement à limiter certaines maladies en diluant les agents pathogènes. Son comportement discret, ses déplacements courts et réguliers, en font une espèce clé pour comprendre la dynamique des milieux forestiers.

Une expansion spectaculaire en France

Depuis la seconde moitié du XXᵉ siècle, le chevreuil connaît une expansion impressionnante en France. Recolonisant progressivement les forêts après une période de raréfaction historique, il a atteint aujourd’hui une stabilité haute dans la plupart des régions. Les départements de l’Est et du Centre affichent les plus forts tableaux de chasse, dépassant régulièrement les 10 000 animaux prélevés chaque année. En moyenne nationale, la densité tourne autour d’1,1 chevreuil pour 100 hectares de surface totale et de plus de 3 pour 100 hectares de surface boisée.

Un gibier soumis à une gestion rigoureuse

Le chevreuil est une espèce gibier emblématique, soumise à un plan de chasse obligatoire sur l’ensemble du territoire. Les prélèvements sont strictement encadrés par des bracelets individuels, attribués en fonction d’objectifs départementaux. Ce suivi attentif est la clé de la stabilité des populations, qui doivent s’accorder avec les enjeux forestiers, agricoles et cynégétiques.

Les plans de chasse permettent de cibler les prélèvements par sexe et classe d’âge, d’assurer une structure de population équilibrée et d’adapter les prélèvements aux réalités locales. La France fait aujourd’hui figure de modèle en matière de gestion cynégétique du chevreuil, alliant densités maîtrisées et maintien d’une belle vitalité des populations.

Les modes de chasse du chevreuil

Le chevreuil se prête à plusieurs types de chasse. L’approche et l’affût, silencieux et sélectifs, sont particulièrement appréciés des chasseurs. Ces modes permettent de prélever avec précision le bon animal, au bon moment, en limitant le dérangement. Dans de nombreux départements, ils peuvent commencer dès le 1ᵉʳ juin.

La battue, plus collective, reste un outil de régulation efficace en automne et en hiver. Elle demande rigueur, organisation et sécurité. Le tir à l’arc, enfin, connaît un développement croissant, encadré par une réglementation stricte et réservé aux chasseurs formés.

Une population sous surveillance

L’évolution démographique du chevreuil est aujourd’hui stable à haut niveau. Si l’expansion territoriale est pratiquement achevée, les densités locales doivent être ajustées régulièrement pour éviter les déséquilibres forestiers. Les indicateurs de suivi comme l’indice kilométrique d’abondance ou les observations d’abroutissement permettent aux fédérations départementales de chasseurs et aux gestionnaires forestiers d’affiner les prélèvements. Le retour progressif du loup dans certaines zones pourrait aussi, à moyen terme, influencer cette dynamique.

Quelle est la différence entre la biche et le chevreuil ?

La biche est la femelle du cerf élaphe, une espèce de grand cervidé. Elle pèse en moyenne de 70 à 100 kg, bien plus que la chevrette, qui est la femelle du chevreuil. Le cerf est un animal de grande taille, alors que le chevreuil est le plus petit des cervidés européens. On les confond souvent dans le langage courant, mais ils n’appartiennent pas à la même espèce.

Quel est le mâle du chevreuil ?

Le mâle du chevreuil s’appelle le brocard. Il se reconnaît à ses bois courts et perlés, qu’il porte de la fin de l’hiver jusqu’à l’automne. Son comportement territorial est marqué : au printemps et en été, il défend avec acharnement son domaine contre les autres mâles.

Quelle est la différence entre un chevreuil et un cerf ?

Le cerf élaphe est beaucoup plus grand et massif : un mâle peut peser jusqu’à 200 kg. Ses bois sont larges, palmés ou très ramifiés, alors que ceux du brocard sont courts et simples. Le chevreuil vit souvent seul ou en petits groupes familiaux, tandis que le cerf se rassemble en harde. Leurs comportements, leurs habitats et leurs modes de chasse sont également différents.

Comment reconnaître un chevreuil ?

Reconnaître un chevreuil est assez simple pour un œil attentif : petite taille, pelage roux en été et gris-brun en hiver, absence de queue apparente, miroir anal blanc bien visible. Le mâle porte des bois courts, la femelle n’en a pas. Leur démarche est légère et vive, avec des bonds souples lorsqu’ils s’éloignent en silence.

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Rédacteur en chef, SoChasse

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