Comment les chasseurs fixent-ils les quotas de chevreuils en France ?

Comment les chasseurs fixent-ils les quotas de chevreuils en France ?

Le chevreuil est aujourd’hui l’un des gibiers les plus présents dans les campagnes françaises. Avec près de 2 millions d’individus estimés sur le territoire, sa gestion est devenue un enjeu central de la chasse durable. Chaque année, les chasseurs, encadrés par les Fédérations départementales, l’OFB et les services de l’État, déterminent avec précision combien de chevreuils peuvent être prélevés sans compromettre l’équilibre naturel.

Les comptages : première étape avant tout tir

Comme pour le cerf, la base du quota repose sur la connaissance de la population locale. Les chasseurs de chaque territoire participent activement à des comptages de printemps et d’hiver, menés selon plusieurs méthodes reconnues :

  • Comptages au phare : effectués de nuit sur des parcours fixes pour observer les chevreuils dans les champs et prairies.
  • Observation diurne : les chasseurs recensent les animaux visibles à la jumelle à des points d’observation précis.
  • Relevés d’indices de présence : traces, crottes, poils ou abroutissements sur la végétation.
  • Caméras automatiques : utilisées dans les zones forestières denses pour compléter les estimations.

Ces comptages permettent d’évaluer la densité moyenne par hectare, la répartition des classes d’âge et le rapport mâles/femelles.

Exemple : dans la plaine de Beauce, les comptages menés en 2024 par la Fédération des chasseurs d’Eure-et-Loir ont montré une densité moyenne de 6,2 chevreuils pour 100 hectares, légèrement supérieure à l’objectif fixé de 5/100 ha. Le quota a donc été relevé de 8 % pour limiter les dégâts agricoles sur les jeunes cultures de colza.

Le plan de chasse : un cadre légal strict

Le plan de chasse chevreuil est obligatoire depuis 1978. Chaque détenteur de droit de chasse dépose une demande de prélèvement à la Fédération départementale, en indiquant le nombre de brocards (mâles), chevrette (femelles) et chevrillards (jeunes) qu’il souhaite tirer.

Ces propositions sont ensuite étudiées, regroupées et ajustées selon les observations réalisées sur le terrain. La Direction départementale des territoires (DDT) fixe ensuite, avec l’avis de la Commission départementale de la chasse et de la faune sauvage (CDCFS), le nombre maximum d’animaux à prélever pour chaque zone de chasse.

Exemple : dans le Jura, le plan de chasse 2024 a autorisé 4 500 prélèvements de chevreuils, répartis à 50 % de femelles, 35 % de jeunes, et 15 % de mâles adultes, afin de maintenir la stabilité démographique tout en réduisant les dégâts forestiers liés au broutement.

Les bracelets : un suivi rigoureux animal par animal

Comme pour le cerf, chaque chevreuil à tirer correspond à un bracelet individuel numéroté, attribué par la Fédération. Dès qu’un animal est prélevé, le chasseur doit fixer le bracelet avant tout transport. Cette pratique garantit la traçabilité totale des prélèvements.

À la fin de la saison, chaque chasseur ou association communale de chasse transmet un bilan précis : nombre de chevreuils vus, tirés, manqués, trouvés morts, etc. Ces données sont centralisées par la Fédération et servent à ajuster les quotas pour la saison suivante.

Ajustements et suivi des populations

Les quotas de chevreuils varient chaque année selon :

  • Les dégâts forestiers et agricoles : si la pression du broutement devient trop forte, les quotas augmentent.
  • Les conditions hivernales : un hiver rigoureux ou une épidémie (comme la gale ou la parasitose) peut amener à réduire les prélèvements.
  • Le taux de reproduction observé : les chevrette mettent bas 1 à 2 faons par an, voire 3 dans les zones agricoles riches.
  • Les résultats de tir de l’année précédente : si le plan de chasse n’a pas été atteint, les autorisations peuvent être ajustées.

Exemple : en Haute-Loire, les chasseurs ont constaté une hausse de 27 % du nombre de faons observés par chevrette après un hiver doux. Le plan de chasse 2025 a donc prévu une augmentation des prélèvements de 10 % pour éviter la surpopulation.

Une gestion de proximité au service de l’équilibre écologique

La gestion du chevreuil illustre le rôle essentiel des chasseurs comme régulateurs de la faune sauvage. Sans régulation, la surpopulation peut provoquer des dégâts importants sur les forêts, en freinant la régénération naturelle, et sur les cultures agricoles.

En travaillant en partenariat avec les forestiers, les agriculteurs et l’OFB, les chasseurs participent à un équilibre durable entre biodiversité, agriculture et gestion cynégétique.

Statistique nationale moyenne :
Chaque année, environ 500 000 chevreuils sont prélevés en France, selon la Fédération nationale des chasseurs. Ce chiffre, stable depuis plusieurs saisons, correspond à un taux de prélèvement moyen de 25 % des effectifs estimés, garantissant la stabilité démographique et la bonne santé des populations sur le long terme.

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Rédacteur en chef, SoChasse

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