En France, la gestion du cerf élaphe n’a rien d’improvisé. Chaque année, les chasseurs, encadrés par la Fédération départementale des chasseurs, l’Office français de la biodiversité (OFB) et l’Office national des forêts (ONF), participent à un suivi scientifique minutieux pour déterminer combien d’animaux peuvent être prélevés sans mettre en danger la population. Derrière chaque tir autorisé, il y a des comptages, des analyses et des équilibres écologiques à respecter.
Les chasseurs au cœur du suivi des populations de cerfs
Avant toute décision, la première étape consiste à évaluer l’état de la population. Les chasseurs participent à des comptages de terrain selon plusieurs méthodes :
- Comptages au phare ou à la jumelle : réalisés à la tombée de la nuit pour repérer les animaux sur les clairières.
- Comptages en battue : les équipes relèvent les animaux levés sur un territoire donné.
- Suivi par indices de présence : traces, crottes, frottis ou mues relevés sur les zones de passage.
- Piégeage photographique et drones thermiques, désormais fréquents pour compléter les observations.
Ces données permettent d’estimer la densité, le rapport mâles/femelles et le succès de reproduction.
Exemple concret : dans la forêt d’Arc-en-Barrois (Haute-Marne), les chasseurs ont estimé en 2024 une densité moyenne de 8,7 cerfs pour 100 hectares. Les résultats ont conduit à réduire de 10 % les tirs de biches, afin d’éviter une surpopulation nuisible à la régénération forestière.
Le plan de chasse, une obligation légale
Le plan de chasse est un outil réglementaire créé en 1963. Chaque détenteur de droit de chasse doit déposer une demande de plan de chasse cervidé, précisant le nombre d’animaux qu’il souhaite prélever, répartis par classes de sexe et d’âge :
- Cerfs adultes,
- Biches,
- Faons.
La Fédération des chasseurs examine ensuite l’ensemble des propositions et transmet les chiffres à la Direction départementale des territoires (DDT), qui arrête les quotas définitifs après concertation avec la Commission départementale de la chasse et de la faune sauvage (CDCFS).
Exemple : dans les Vosges, le plan de chasse 2024 a autorisé 1 520 prélèvements, dont 40 % de biches, 45 % de jeunes et 15 % de mâles adultes. Ces chiffres visent à stabiliser la population et à rééquilibrer le ratio mâles/femelles, essentiel pour une gestion durable.
Un suivi strict grâce aux bracelets
Chaque cerf autorisé au tir correspond à un bracelet individuel numéroté, fourni par la Fédération. Dès qu’un animal est prélevé, le chasseur doit fixer le bracelet sur la patte ou le bois avant tout déplacement. Cette procédure permet de contrôler les prélèvements et de garantir que personne ne dépasse son quota autorisé.
En fin de saison, un bilan de chasse est remis à la Fédération : nombre d’animaux vus, tirés, manqués, ou morts naturellement. Ces données alimentent la base nationale de suivi cynégétique, contribuant à ajuster les quotas pour la saison suivante.
Des quotas évolutifs selon l’état des forêts et des cerfs
Les quotas de cerfs ne sont pas figés. Ils évoluent chaque année selon plusieurs facteurs :
- Dégâts forestiers et agricoles : si le broutement devient excessif, les tirs augmentent.
- Hivers rigoureux ou maladies : les prélèvements sont réduits.
- Taux de reproduction observé : via les autopsies et suivis biologiques.
- Résultats du plan de chasse précédent : les quotas peuvent être ajustés à la hausse ou à la baisse.
Exemple : au domaine de Chambord, les gestionnaires adaptent chaque année le plan en fonction du taux de gestation des biches. En 2023, avec 71 % de femelles gestantes, les quotas ont été relevés pour éviter une densité trop forte.
Les chasseurs, premiers gestionnaires de l’équilibre naturel
La chasse au cerf n’a pas pour seul objectif la venaison. Elle est devenue un outil de gestion écologique. Sans régulation, les populations de cervidés peuvent rapidement menacer la régénération forestière et la biodiversité végétale.
Les chasseurs, aux côtés des forestiers et agriculteurs, veillent donc à maintenir l’équilibre entre faune et habitat.
Dans des départements comme la Lozère, la Savoie ou la Meuse, cette collaboration entre FDC, agriculteurs et ONF a permis de réduire de 30 % les dégâts forestiers en cinq ans, tout en préservant des populations saines et équilibrées.










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