La battue est l’action de chasse la plus collective et la plus exigeante en matière de sécurité. Avant chaque départ, le rond n’est pas un simple rituel : c’est le moment où l’organisateur expose la réglementation, fixe les consignes de tir, répartit les postes et rappelle la courtoisie due aux autres usagers de la nature.
Pourquoi le rond est décisif?
Le chef de battue engage sa responsabilité à chaque consigne prononcée. Il garantit la sécurité, le respect du plan de chasse et la cohérence de l’organisation. Au rond, chaque participant écoute en silence, prend acte des règles et signe le registre de battue. Une consigne bien donnée, comprise et appliquée sauve des vies ; elle évite aussi les malentendus qui ternissent une journée de chasse.
Réglementation et documents à contrôler
Chaque chasseur doit présenter un permis de chasser valide (national ou départemental), sa validation à jour et son assurance. Sans ces trois éléments : pas de permis, pas de chasse. Le transport des armes en véhicule se fait déchargées, sous étui. L’usage des téléphones et talkies est limité à la sécurité et à la coordination ; toute utilisation à des fins cynégétiques (annoncer la direction des animaux) est proscrite. À l’extérieur, la pose et le retrait des panneaux “Chasse en cours” participent à la prévention et à l’image de la chasse.
Équipement obligatoire et bon sens vestimentaire
Le port d’un gilet ou d’une veste haute visibilité (orange fluorescent) est indispensable pour tous les participants, postés comme traqueurs. La pibole (ou trompe) est l’outil clair et universel du signal ; un talkie-walkie peut compléter le dispositif, mais la parole y est limitée. La haute visibilité relève de la sécurité passive : on se voit mieux, on se protège mieux.
Placement, poste et immobilité
Chaque posté se rend exactement à l’emplacement désigné par le chef de ligne et n’en bouge pas avant la fin de traque. Au poste, on identifie ses voisins, on lit son environnement (layons, routes, chemins, habitations, zones fréquentées) et l’on se place ventre au bois, face à l’enceinte traquée, pour maîtriser ses angles. Entre les traques, l’arme est portée cassée ou culasse ouverte, visible de tous.
Angles de 30° : matérialiser pour ne pas se tromper
La moitié des accidents surviennent en battue au grand gibier et une règle simple les évite : ne jamais tirer dans les 30° de part et d’autre de la ligne. Méthode terrain : 5 pas latéraux + 3 pas perpendiculaires de chaque côté du poste ; plantez un repère à l’issue, vos angles de tir sont clairement matérialisés. Un layon trop étroit, un bois trop sale ? On s’abstient.
Chargement, déchargement et tir fichant
Le début de battue est sonné : on peut charger. La fin de battue est sonnée : on décharge immédiatement. Les tirs sont fichants (au rembuché), jamais à l’horizontale vers un obstacle dur ou une surface d’eau. On ne suit pas en joue sur la ligne. Interdiction de tirer dans la traque, sauf consigne individuelle du chef de ligne ou de traque. Un animal entrant dans l’enceinte ne se tire pas. Un tir sûr est un tir où l’animal est parfaitement identifié et l’environnement parfaitement maîtrisé.
Axes sensibles : routes, habitations et voies
Le tir à balle est obligatoire pour le grand gibier et il est interdit en direction d’un axe routier, d’une habitation, d’une voie ouverte au public, d’une ligne électrique ou d’un espace où un tiers pourrait surgir. La règle est simple : si l’environnement n’est pas sûr, on s’abstient.
Rôle des traqueurs et protocole “ferme”
L’autorisation de tir des traqueurs relève du responsable de chasse. Si elle est donnée, la traque doit rester alignée, avec des personnes de confiance au centre et aux ailes, et un protocole d’intervention en cas de ferme (points d’accès, rôles, communication). En végétation dense, on se signale régulièrement par la voix, la trompe ou la pibole.
Communication avec la pibole : un langage commun
Les sonneries rythment la journée et s’appliquent à tous. Exemple de codification claire : 1 coup long = début de battue ; 1 coup long + taïaut = fin de battue ; 10 coups courts = incident/arrêt momentané ; 1 coup court = promeneur sur layon ; 2 coups = chevreuil ; 3 coups = sanglier ; taïaut + 3 coups = laie suitée vue ; 4/5/6… coups = grand cervidé. Mieux vaut une codification stable que chacun connaît par cœur.
Fin de battue : contrôle systématique des tirs
La fin sonnée, tout le monde décharge. Ensuite seulement, chaque tireur contrôle tous ses tirs : impact, poils, sang, os. Même si l’animal n’a pas marqué au tir, on vérifie. Toute atteinte présumée est signalée au chef de ligne. On reste sur place en cas d’indice ou de doute. On ne suit pas la piste d’un animal blessé au-delà de 100 mètres : on balise (ruban/papier biodégradable, brisée) et on attend les consignes, au besoin un conducteur de chien de sang.
Plan de chasse, bracelets et annonce des animaux
Un animal soumis au plan de chasse ne se manipule pas avant la pose du bracelet par le responsable. Le taïaut après un tir présumé atteint permet de coordonner l’équipe et d’éviter toute ambiguïté sur le quota restant. On privilégie le prélèvement d’un animal isolé, on double le même animal si nécessaire. On ne tire pas dans une harde compacte.
Cohabitation et image de la chasse
La forêt peut être traversée par des chemins communaux et fréquentée par des promeneurs, VTT, cueilleurs. La consigne est double : courtoisie et anticipation. On annonce sa présence, on suspend le tir le temps du croisement, on explique calmement les consignes de sécurité qui protègent tout le monde. L’affichage le matin même et le retrait à l’issue participent à la confiance.
Armes semi-automatiques : exigences accrues
Une semi-auto ne se “casse” pas : la discipline doit donc être exemplaire. En déplacement : canon vers le ciel, culasse ouverte ostensiblement, douille bloquante si nécessaire. Sur le poste : règles identiques à toutes les armes, avec un soin particulier porté au déchargement à la fin sonnée. Ce n’est pas l’arme qui est dangereuse, mais les habitudes que l’on prend avec elle.
Jeunes, anciens : l’attention ne s’achète pas
Les jeunes chasseurs ont souvent passé une épreuve pratique récente ; les anciens ont l’expérience du terrain. Dans les deux cas, l’attention peut faiblir. La formation sécurité décennale existe pour cela : remettre à niveau les réflexes et l’état d’esprit. À la chasse comme au volant, l’expérience n’autorise jamais la négligence.
Responsabilités et traçabilité
Le chef de battue prépare les postes, matérialise les zones de danger, contrôle les miradors et fait signer le registre avec permis, validation et assurance. Les chefs de ligne placent, contrôlent, centralisent les annonces et les tirs. Mais chaque chasseur reste seul responsable de sa décision de tir. La traçabilité (registre, bracelets, balisages) protège la sécurité et la réputation de tous.
Ce qu’il faut retenir et répéter au rond
Angles de 30° matérialisés avant le premier coup de cor, tir fichant uniquement, pas de tir dans la traque ni sur un animal entrant, chargement au début sonné, déchargement à la fin sonnée, contrôle de tous les tirs, annonce immédiate au chef de ligne, respect des axes sensibles (routes, habitations, voies). Et surtout : en cas de doute, on s’abstient.
La sécurité comme culture commune
Une battue réussie est une battue où chacun repart fier d’avoir chassé proprement, sûrement et courtoisement. Les consignes au rond ne sont pas là pour compliquer la vie des chasseurs, mais pour la protéger. Répétées, comprises et vécues à chaque sortie, elles font durablement de la battue un moment exigeant, respectueuse des règlements, des territoires et de tous les usagers de la nature.












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