On prend les mêmes et on recommence. Voilà sans doute l’état d’esprit de nombreux chasseurs français en ce mardi 2 décembre. Pendant que l’Office français de la biodiversité lance une vaste opération de contrôle jusqu’au 15 décembre, certains médias semblent, eux, avoir choisi leur moment pour ajouter une couche inutilement méprisante.
L’an dernier, rappelons-le, 10 000 chasseurs avaient été contrôlés dans le cadre de la même campagne, pour seulement 229 signalements. Pas de quoi alimenter une révolution. Mais assez, semble-t-il, pour inspirer un jeune dessinateur du Progrès, visiblement ravi de ressortir les vieux clichés poussiéreux.
Le Progrès, justement, n’est pas un petit média sorti du fourré. Près de 200 000 lecteurs à Lyon, 75 000 dans le Jura. Une audience de poids, surtout dans un département où beaucoup connaissent un chasseur, vivent avec un chasseur ou… sont eux-mêmes chasseurs. D’où le malaise.
Car que voit-on dans ce dessin publié dans ses pages ?
Un agent de l’OFB face à un chasseur représenté comme un personnage titubant, le nez rouge, les yeux injectés de sang, façon caricature d’ivrogne sortie tout droit d’un sketch des Inconnus. La ficelle est grosse, et l’imagination, bien maigre. Le dessinateur, 30 ans à peine, n’était d’ailleurs même pas né lorsque le fameux sketch est sorti. Mais visiblement, recycler les vieilles casseroles reste plus simple que de réfléchir.
Le problème n’est pas seulement esthétique : il est sociétal
Car demain, 75 000 Jurassiens vont voir cette caricature.
Que penseront les grands-mères, les enfants, les familles ?
« Dis maman, pourquoi il a un gros nez rouge le monsieur ? C’est papa ? C’est papi ? »
Ce dessin n’a rien de drôle. Il stigmatise près d’un million de pratiquants d’une activité légale, encadrée, contrôlée, et quoi qu’en dise la caricature, bien moins accidentogène que de nombreux sports pratiqués par dix fois moins de personnes. À ce jour, aucun accident de chasse n’a été causé par un chasseur positif à l’alcool. Et pour cause : aucun chasseur sain d’esprit n’a envie de côtoyer un tireur aviné. C’est du simple bon sens. C’est aussi la raison pour laquelle les fédérations de chasseurs ont elles-mêmes soutenu l’harmonisation des règles d’alcoolémie entre route et chasse.
Quand l’humour rate sa cible
Au-delà des chiffres, c’est l’état d’esprit de ce dessin qui interroge. En pleine période de fêtes, où l’on parle volontiers de tolérance et de cohésion, choisir de ridiculiser arbitrairement une catégorie de citoyens ressemble davantage à un exercice de facilité qu’à un vrai travail journalistique.
Il ne s’agit pas ici de protéger une corporation susceptible, mais de défendre l’idée simple qu’un média régional devrait éviter de nourrir les divisions par des caricatures datées. Que l’auteur du dessin ait voulu faire rire, soit. Mais entre irrévérence et mépris, il existe une ligne. Et là, elle est clairement franchie.
Le vrai problème : la validation éditoriale
Car enfin, un dessin peut être raté. Mais un dessin raté validé, relus, publié : cela interroge davantage.
Le vrai responsable n’est peut-être pas l’apprenti caricaturiste mais bien le rédacteur en chef du Progrès, dont le sens des priorités semble aussi inspiré que le coup de crayon de son collaborateur.
Le nom du journal promet le progrès. Il serait peut-être temps… d’en faire preuve.





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