En France, la régulation des espèces dites “nuisibles” ne relève pas directement de la chasse. Le piégeage est une activité légale, encadrée par le Code de l’environnement, mais ne nécessite pas de permis de chasser. Ce dispositif est souvent méconnu du grand public, alors même que des milliers de Français sont confrontés chaque année à des problèmes de ragondins, de rats, de lapins, de renards, de pies, de corneilles ou encore de fouines. Pourtant, la réglementation permet de piéger ces espèces dans un cadre strict et organisé, à condition de disposer d’un agrément préfectoral et d’utiliser des pièges homologués.
Le piégeage n’est pas un acte de chasse
Les opérations de piégeage des animaux d’espèces sauvages classées « susceptibles d’occasionner des dégâts » ne sont pas considérées comme des actes de chasse. Cela signifie qu’un piégeur agréé n’a pas besoin d’être titulaire d’un permis de chasse pour exercer son activité. En revanche, si l’animal est mis à mort par arme à feu après capture, le piégeur doit être titulaire des autorisations nécessaires pour la détention et l’utilisation d’une arme, conformément au code de la sécurité intérieure. Ces règles sont fixées par l’arrêté ministériel du 1er août 1986 et par l’arrêté du 29 janvier 2007, qui encadre l’activité de piégeage en France.
Une formation obligatoire pour devenir piégeur agréé
Pour piéger en dehors de sa propriété et capturer des espèces classées nuisibles, il faut devenir piégeur agréé. Cet agrément est délivré par le préfet du département, après avoir suivi une formation organisée par la Fédération Départementale des Chasseurs. Cette formation est accessible dès 15 ans, et la pratique est autorisée dès 16 ans avec une autorisation parentale pour les mineurs. Le permis de chasse n’est pas exigé pour participer à cette formation.
La formation dure 16 heures sur deux jours et comporte plusieurs volets :
– Identification des espèces ciblées
– Types de pièges autorisés et conditions d’utilisation
– Manipulation des pièges
– Règles de bien-être animal pour limiter les souffrances
– Application pratique sur le terrain
Une fois la formation validée, le piégeur reçoit un numéro d’agrément qui l’autorise à poser des pièges sur les terrains où il dispose des droits nécessaires.
Ce que l’on peut piéger légalement en France
Le piégeage concerne principalement les espèces susceptibles d’occasionner des dégâts, anciennement appelées « espèces nuisibles ». La liste peut varier légèrement selon les départements, mais elle comprend généralement :
– Renard
– Fouine
– Martre
– Corbeau freux
– Corneille noire
– Pie bavarde
– Étourneau sansonnet
– Ragondin
– Rat musqué
Ces espèces font l’objet d’arrêtés préfectoraux ou ministériels spécifiques. Le piégeage joue ici un rôle essentiel dans la gestion de la faune sauvage, la protection des cultures agricoles, la préservation du petit gibier et la sécurité sanitaire (par exemple pour limiter les risques liés à la leptospirose transmise par le ragondin).
Les types de pièges autorisés
La réglementation distingue plusieurs catégories de pièges :
– Pièges de catégorie 1 : cages-pièges permettant la capture vivante d’animaux. Leur utilisation ne nécessite pas de permis, mais les piégeurs doivent respecter des règles strictes de relevé et de mise à mort non cruelle.
– Pièges de catégorie 2 : pièges à appât ou à percussion létale, réservés aux piégeurs agréés. Leur utilisation est encadrée pour éviter tout risque pour les espèces non ciblées.
– Pièges de catégorie 3 et 4 : collets et lacets, autorisés uniquement dans certaines conditions et pour certaines espèces.
– Pièges de catégorie 5 : pièges sélectifs pour oiseaux, très réglementés.
Les pièges à mâchoires sont interdits en France depuis 1995, car ils sont considérés comme cruels. Les cages-pièges, en revanche, sont largement utilisées, notamment pour le piégeage des ragondins et des fouines. Le marquage et le contrôle régulier des pièges sont obligatoires pour éviter toute souffrance animale prolongée.
Peut-on piéger sans permis de chasse?
Oui, il est possible de piéger sans permis de chasse si l’on obtient un agrément préfectoral et que l’on utilise des pièges homologués. Toutefois, sans agrément, une personne ne peut piéger que sur sa propriété privée et uniquement avec des pièges de catégorie 1 (cages-pièges). Pour capturer au-delà de sa propriété ou pour utiliser des pièges létaux, l’agrément est indispensable. En cas de mise à mort par arme à feu, le piégeur doit respecter la réglementation sur les armes.
Le coût moyen des pièges
Le coût du matériel de piégeage est variable selon les espèces ciblées et le type de piège utilisé. Une cage-piège à ragondins coûte entre 40 et 90 euros, une cage à fouines entre 30 et 60 euros, un collet homologué quelques euros pièce. Les pièges à percussion sélectifs sont plus onéreux, entre 100 et 200 euros selon le modèle. Certains piégeurs équipent leurs pièges de balises électroniques pour être alertés en temps réel lorsqu’un animal est capturé, un dispositif qui coûte environ 70 euros par balise et 20 euros d’abonnement annuel par piège.
Un outil essentiel pour la régulation des populations
Les ragondins, introduits en France à la fin du XIXᵉ siècle, sont aujourd’hui présents sur l’ensemble du territoire et provoquent des dégâts importants aux berges, fossés et cultures agricoles. Des opérations de piégeage collectif sont régulièrement organisées en Charente-Maritime, dans le Sud-Ouest et dans de nombreux départements français. Les corneilles et les pies bavardes sont responsables de dégâts importants sur la petite faune et dans les élevages. Les fouines occasionnent des nuisances en zone habitée, notamment dans les combles et greniers.
Le piégeage légal permet d’apporter des réponses concrètes à ces problématiques tout en restant encadré. Les piégeurs agréés doivent rendre compte de leurs prises aux autorités compétentes.
Une formation encore trop méconnue du grand public
Comme pour la chasse à l’arc, la formation au piégeage reste insuffisamment visible pour le grand public. Pourtant, elle pourrait répondre aux besoins de nombreux particuliers confrontés à la prolifération d’espèces invasives. La communication autour du piégeage est encore trop limitée. Ouvrir ces formations à un public plus large permettrait une régulation plus efficace, notamment dans les zones rurales et périurbaines où les moyens d’action sont restreints.
L’action de l’U.N.A.P.A.F.
L’Union Nationale des Associations de Piégeurs Agréés de France (U.N.A.P.A.F.) regroupe les associations départementales et défend le piégeage légal et encadré. Elle informe les piégeurs et le public, contribue à la régulation des espèces invasives, et agit en tant qu’interlocuteur auprès des pouvoirs publics et des institutions européennes. L’objectif est de défendre le piégeage comme une alternative crédible à la lutte chimique, de préserver les équilibres écologiques et de protéger les activités agricoles et cynégétiques.
Un débat à ouvrir
À l’image de la chasse à l’arc, le piégeage pourrait bénéficier d’une meilleure communication nationale, voire d’une formation simplifiée pour les particuliers confrontés à des problèmes concrets. L’enjeu est autant écologique que sanitaire et économique. Dans certaines régions les ragondins, les sangliers ou les corneilles causent chaque année des centaines de milliers d’euros de dégâts. Le piégeage encadré représente une solution efficace, respectueuse de la réglementation et du bien-être animal.











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